Tout en vrac
Dans le contexte de crise actuelle liée à l’épidémie de coronavirus, votre revue a décidé de mettre chaque jour en ligne, depuis le 20 mars – journée de célébration de la francophonie – et tous les jours à midi, un article du « Français dans le monde » en libre accès. Aujourd’hui, la rubrique « Tendances » du numéro 407 de septembre-octobre 2016, par Jacques Pécheur. Bonne lecture à toutes et tous !
Acheter des produits en vrac, c’est le choix de nombreux Français, conquis par ce mode de consommation « responsable ».
80 g de fruits secs, 70 g de farine, 120 g de pâtes… Léo passera ensuite à côté des bocaux de lessive puis d’huile pour soutirer les quantités dont il aura besoin. Et ils sont de plus en plus nombreux à reproduire ces gestes : acheter en vrac.
Paris, Bordeaux, Marseille, Nantes, Nancy mais aussi Bayonne, Issoire, Tournai, Luxembourg, qu’elles s’appellent La Recharge, Au Grain près, Le Bar à Vrac ou, en plus anglo-saxon, Day by Day (25 franchises en France d’ici la fin de l’année 2016), les boutiques de vente en vrac se multiplient pour répondre à une nouvelle demande du consommateur qui renoue avec la plus ancienne des pratiques de l’épicerie : la vente en vrac. Une pratique abandonnée avec le développement de la grande distribution qui ne voulait voir que des caddies pleins à ras bord. Tant pis si une partie finissait à la poubelle : après tout, personne ne s’émouvait que les Français produisent 33,7 millions de tonnes de déchets alimentaires et que 30 % de la production mondiale s’apparente à du gaspillage !
Écolos et éconos
Mais voilà, COP21 oblige, « Biocoop 21 » ouvrait en décembre 2015 dans le Xe arrondissement de Paris, le premier magasin « 100 % vrac », une boutique qui devait être éphémère mais dont le succès allait dépasser toutes les espérances, un geste militant le temps de la conférence sur le climat, histoire de sensibiliser selon son chef de marché Benoît Roger, « sur les inconvénients et les risques du suremballage », d’offrir la possibilité d’« acheter seulement ce dont on a besoin pour se nourrir ou ce qu’on veut tester » et de constater que « c’est moins cher de 15 à 30 %, les coûts de packaging en moins ».
L’affaire aurait pu s’arrêter là mais force est de constater que le consommateur y prend goût, et pas seulement sa caricature bobo qui aurait dû être sa cible première : le retraité comme l’étudiant, les ménages aux faibles revenus ainsi que les célibataires ou les confectionneurs de douceurs pâtissières calibrées au gramme près, les écolos soucieux de la surproduction de plastique tout autant que les « éconos » qui ne veulent pas payer pour le packaging et le design qui va avec.
Les consommateurs sont de plus en plus écocitoyens.
Pas étonnant donc que tout le monde s’y mette, y compris les grandes enseignes comme Carrefour, Auchan ou Monoprix qui ont vu là un moyen d’ajouter une offre « discount » avant de se tourner vers une offre plus sélectionnée. Car ce qui fait aujourd’hui le succès de la vente en vrac c’est la combinaison de plusieurs facteurs : la liberté du choix, la proximité, la qualité des références, le prix et le service. Et pour assurer ce succès, les initiateurs du mouvement peuvent aujourd’hui compter sur le Réseau Vrac créé en 2015 et associé à Zero Waste France œuvrant pour la réduction des déchets, qui aide les porteurs de projets (il y en aurait 150 en gestation en 2016), soutient le secteur d’activité et assure la communication sur le vrac. Mais les consommateurs eux-mêmes sont de plus en plus écocitoyens : faire un geste pour la planète, acheter la juste dose, consommer responsable, tisser des liens, consommer en vrac a décidément bien des vertus
À SAVOIR
250 :Le nombre de projets d’ouverture d’épiceries 100 % vrac actuellement en cours en France.
20 kg : La quantité moyenne d’aliments consommables jetés par chaque Français par an. Dont 7 kg encore emballés.
1/3 : Les emballages représentent un tiers de nos poubelles en poids et la moitié en volume.