Fdlm #411 – Société : les sondages d’opinion en matière politique (3’05’’)
Les sondages racontent-ils n’importe quoi ? Les récents événements invitent à se poser la question. Le oui des Britanniques lors du référendum sur le Brexit, l’élection de Donald Trump aux États-Unis, les surprises des résultats des primaires de la droite et de la gauche en France : à chaque fois, les instituts de sondage n’ont pas su prédire les résultats de ces élections. Alors les erreurs proviennent-elles des modes de collecte des données ? De la taille et ou de la représentativité des échantillons ? Des méthodes de calcul ? De l’interprétation des résultats ? De la volatilité des choix des personnes interrogées ? Éléments de réponse avec Benjamin de Haut.
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TRANSCRIPTION
Les humeurs des Français sont de plus en plus difficiles à interpréter pour les sondeurs d’opinion / historiquement les études ont presque toujours vu juste en France au moment des élections majeures / mais depuis quelque temps les erreurs sont devenues courantes / Donald Trump aux États-Unis / le Brexit / les primaires de la droite ou de la gauche en France / à chaque fois les sondages se sont trompés / si bien que tous les hommes politiques s’en prennent aujourd’hui publiquement aux instituts de sondage / l’une des raisons qui peut expliquer ces erreurs serait les nouvelles méthodes des sondeurs / depuis les années 2000 presque tous les sondages s’effectuent par Internet / le porte-à-porte et les sondages par téléphone ont disparu car trop coûteux et trop longs à réaliser / les personnes sondées sont donc des internautes / les retraités peu diplômés / les artisans ou les commerçants des classes moyennes et des classes populaires manquent donc souvent dans les panels de sondés / pendant les primaires de la droite / de la gauche en France certains sondages n’ont sondé que quatre cents personnes certaines d’aller voter / certains médias ont donc fait le choix de ne plus publier ces sondages sauf s’ils sont réalisés sur des échantillons suffisamment importants / de dix à quinze mille personnes / pour le politologue Roland Cayrol il faut regarder les sondages comme une tendance et non pas comme une vérité absolue – R. C. – Les sondages / c’est pas comme des euros / des litres ou des kilos / il y a une marge d’erreur / à cinq points on n’est pas loin de la marge d’erreur / il y a donc un risque / mais attention / un seul sondage où il y aurait cinq points d’écart / il faut le prendre avec des pincettes / si vous avez en même temps sept ou huit sondages d’instituts différents qui donnent ces mêmes cinq points / alors là c’est béton – B. de H. – Un autre soupçon pèse sur les sondeurs / c’est leur façon de corriger les chiffres / le sénateur Jean-Pierre Sueur a réussi en avril 2016 à faire passer une loi pour que les sondeurs expliquent leurs secrets de fabrication et publient leurs chiffres bruts / ceux qu’ils ont récoltés après enquêtes / mais ça n’a pas fonctionné – J.-P. S. – Cette proposition de loi / elle est restée en sommeil quatre ans à l’Assemblée nationale / si bien qu’il nous a fallu beaucoup de ténacité pour parvenir enfin à ce que notre loi sur les sondages soit pour l’essentiel intégrée dans une loi récente sur l’élection présidentielle / maintenant c’est la loi / mais ce qui nous préoccupe / c’est que cette loi n’est pas appliquée – B. de H. – Alors la loi n’a pas réussi à imposer la transparence sur les chiffres recueillis / les instituts s’accrochent à leurs secrets de fabrication / en fait seule la Commission des sondages qui a vu le jour en 1977 a accès à ces chiffres / elle a même le pouvoir de sanctionner / mais elle ne l’a jamais fait depuis sa création / aujourd’hui de nouvelles méthodes existent / plus précises / plus concluantes / elles consistent par exemple à regrouper des sondages classiques avec des remontées de réseaux sociaux et des études sur les recherches des gens sur Internet / le problème / c’est que ces sondages coûtent deux à trois fois plus chers et que certains médias ne sont pas prêts à payer plus.
LEXIQUE
Primaires : scrutin organisé par un parti politique visant à désigner son candidat à une élection.
Prendre avec des pincettes : (expression imagée, les pincettes étant des petites pinces) prendre avec précaution, avec circonspection, saisir avec prudence, considérer avec du recul.
C’est béton : (familier) c’est du solide, c’est inattaquable.