Le Coopérant, l’expatrié et l’immigré
Par Josué Ndamba
Dans un petit texte d’une centaine de pages[1], un Congolais qui n’est ni linguiste ni lexicographe, s’essaie à la plume et s’amuse à passer à la douane les trois termes de son titre, en examinant minutieusement les contextes de leur emploi. On ne saurait dire s’il est influencé par « Les mots de l’actualité » et « La danse des mots » présentés au quotidien par Yvan Amar sur Radio France Internationale ; ou par sa propre expérience en France où il a séjourné pendant longtemps et au Congo où il travaille actuellement.
La présentation du texte en quatrième de couverture annonce que c’est « le premier roman » de l’auteur ; en réalité, il s’agit d’un recueil de 14 nouvelles alignées sous forme de chapitres, précédées d’une « introduction » et qui se terminent par une « conclusion ».
L’introduction et la conclusion donnent ses réflexions sur les dénotations et les connotations des trois termes, qui sont illustrées par les différentes nouvelles ; à la manière des contes philosophiques de Voltaire.
Dans l’introduction il se penche sur les dénotations (les définitions que donne le dictionnaire) des trois termes ; et dans la conclusion il affirme avoir démontré dans ses textes que « le migrant des pays du sud ne peut et ne saura être un expatrié, mais toujours un immigré dans les pays développés. On comprend donc mieux le mépris et la traque dont ils sont l’objet dans les pays développés même les plus enclins aux droits de l’homme » Quelle que soit sa qualification, un ressortissant du tiers-monde sera toujours un immigré en Europe ; même sans qualification, un ressortissant du Nord ne sera jamais un immigré au Sud, mais bien un expert ou un expatrié.
De « L’enseignant improvisé » qui nous présente un jeune Volontaire du Service National qui se retrouve en Afrique comme « professeur de mathématiques » en classe de seconde scientifique dans un grand lycée d’Afrique, aux « Européens noirs au service des Africains » qui nous présente l’expérience lamentable de trois jeunes cadres experts d’origine africaine, envoyés au Mali pour apprendre aux paysans comment mieux cultiver le mil, toutes ces nouvelles aboutissent à la même conclusion : les couples du genre expatrié/immigré, coopérant/immigré semblent fonctionner aujourd’hui sur le même modèle que langue/dialecte, citoyen/indigène ou civilisé/sauvage au temps de la colonisation.
Ange Kounkou est diplômé en sciences de l’alimentation, option technologie et contrôle de qualité des aliments. Il travaille à Pointe-Noire (au Congo) où il coordonne les activités de la pêche et de l’aquaculture.
[1] Kounkou Ange, Le Coopérant, l’expatrié et l’immigré, Cyr Editions, Echirolles, 2012, 102 pages.