Vous avez peur que ça bulle dans votre classe ? Et si vous utilisiez la BD ?
L’an dernier, avec un groupe d’enfants j’ai parfois rencontré des difficultés pour les motiver, en particulier dans le domaine de l’expression orale. Il était souvent difficile de les amener au-delà de la répétition de mots. J’utilisais principalement des albums, des comptines, des cartes-images et des jeux mais je me suis dit que ce serait intéressant de leur proposer un nouveau support pour stimuler leur attention. Et la bande dessinée ? Oui, pourquoi pas… mais au début j’ai eu quelques réticences que j’ai envie de vous faire partager.
Avec des petits qui ne savent pas encore lire, la BD a-t-elle un intérêt ?
Oui car il existe des BD muettes et si vous leur demandez de raconter l’histoire, l’organisation en cases permet aux enfants de structurer leur récit. Ils peuvent par exemple énoncer une phrase par case. Bien entendu, cette activité est possible avec des élèves sachant déjà formuler des phrases simples du type «Il se lève. Il mange. Il va à l’école.» Formuler des hypothèses sur la suite de l´histoire, dessiner la suite ou mettre en scène des marionnettes conviennent tout à fait à des enfants de cet âge. Je conseille notamment la série Petit Poilu pour ceux qui ont des bambins entre 3 et 6 ans. Les planches sont muettes, les illustrations claires et le héros, attachant, a beaucoup plu à mes élèves.
La langue des bandes dessinées n’est pas trop familière, trop orale pour des enfants et des adolescents?
Il s’agit bien entendu de choisir le support en fonction de l’âge et du niveau des élèves, mais je pense que ce langage familier est une richesse. Il est en effet intéressant de faire découvrir aux élèves qu’il existe des français, notamment les registres standard et familier, et leur apprendre à les utiliser selon le contexte (écrit, oral, avec des proches…). La BD est un document authentique qui permet la découverte de cet aspect ainsi que des éléments culturels francophones. Avec des adolescents on peut par exemple demander de relever dans une planche les expressions appartenant au français familier, de les écrire et de les transformer en français standard (exemples: «c´est c´que tu crois», «trop marrant»).
Avec un groupe d’adolescents de niveau A2 j’ai utilisé une planche de Lisa Mandel intitulée Eddy Milveux et sa blatte magique et ça a plutôt bien fonctionné. Je vous raconte ! Avant de distribuer la planche aux élèves j’ai retiré la dernière case qui correspond à la chute. Je les ai interrogés sur le type de document, les personnages, le titre, le genre de la BD. Je leur ai donné un peu de vocabulaire spécifique à la BD puis ils ont imaginé le contenu de la dernière case et donné leur avis sur la planche. On a également travaillé sur le langage familier et ils étaient contents de découvrir de nouvelles expressions utilisées par des français de leur âge (Zut, cinq sur cinq, un mec). Les élèves ont aussi interprété les différents personnages et on a fait de la grammaire (décrire quelqu’un en utilisant une comparaison, donner des conseils au personnage principal pour plaire aux filles). J’ai finalement été étonnée du nombre d’activités possibles à partir de ce support et ça m’a encouragée à renouveler l’expérience !
J’espère aussi vous avoir convaincu ! Cependant, certains me diront peut-être, et à juste titre, «Je n’y connais pas grand chose en BD… Alors comment choisir la planche qui motivera mes élèves?». J’ai moi-même été un peu perdue devant le nombre de titres existants, mais j’ai finalement trouvé quelques astuces me permettant de bien choisir. Je vous en parlerai dans mon prochain billet. En attendant, n’hésitez pas à poser des questions, à nous faire part de vos expériences ou à nous révéler vos planches de BD préférées !
Céline Podevins, enseignante à l’Alliance française de Grenade