L'hétérogénéité en classe de FLE: pistes de réfléxion et d'action
La diversité des publics, des individus, les aléas des motivations et des histoires individuelles, les différentes habitudes d’apprentissage sont autant de réalité du quotidien de l’enseignant. Ainsi lors de journées pédagogiques, nous avons réfléchi à l’Alliance Française de Paris sur l’hétérogénéité en classe de FLE. Dans son intervention sur ce sujet, Emmanuelle Huver distingue trois types d’hétérogénéité. Je m’efforcerai d’envisager ici différentes techniques pour gérer cette réalité et la convertir en un atout pour la classe.
Par « l’hétérogénéité cognitive », la chercheuse envisage les différentes façons d’apprendre correspondant tout autant aux « différents profils d’apprentissages » qu’aux « représentations mentales » c’est-à-dire aux relations qu’entretient chaque apprenant avec la langue cible et qui influeront sur sa motivation. Pour ce qui est du premier aspect, n’oublions pas que l’enseignant aura tendance à expliquer suivant ses propres réflexes. Il faudra alors s’efforcer de varier le plus possible une explication en sollicitant différents canaux de perception, de s’appuyer sur les explications des étudiants qui permettent de sortir de ses propres schémas, en reprenant un geste, en faisant chercher l’opposé du terme, écrire le mot en le répétant, en l’associant à une image. Pour travailler le second aspect évoqué par la chercheuse, c’est-à-dire les représentations de la langue-cible par les apprenants, on pourra expliciter et mettre en commun les motivations pour rendre l’apprentissage plus signifiant.
« L’hétérogénéité sociale » ou culturelle comprend les différences de « culture d’apprentissage, de modèle éducatif » : au cours de leur carrière d’apprenant, les élèves acquièrent des habitudes d’apprentissage qui varient suivant le cursus de chacun. J’ai pu ainsi remarquer que se déplacer dans la classe, poser des questions, dire qu’on ne comprend pas, étaient des attitudes qui ne vont pas toujours de soi suivant les cultures éducatives. C’est d’ailleurs souvent entre la culture d’apprentissage/enseignement de l’enseignant et celle de son public que l’écart est le plus grand. Il faut donc avant tout rester à l’écoute des pratiques des apprenants pour pouvoir les faire évoluer. Apprendre à apprendre s’apprend, mais de façon très progressive et grâce à une négociation au quotidien pour une évolution des habitudes d’apprentissage parfois très traditionnelles.
Quand Emmanuelle Huver parle d’« hétérogénéité linguistique », elle se réfère à la variété de nationalités pour les groupes multinationaux mais aussi au capital linguistique des apprenants : parlent-ils d’autres langues ? Parle-t-on d’autres langues dans leur entourage ? Leur langue maternelle est-elle proche ou éloignée de la langue cible ? Avec le plurilinguisme et tout en privilégiant la langue cible comme langue de communication en classe, je serais pour indiquer les ponts que l’apprenant peut établir avec telle ou telle langue connue. Reconnaître la multiplicité des langues et des cultures de la classe, ouvrir à la différence, sont autant d’atouts et d’attitudes qui favoriseront la découverte de la langue cible.
On peut enfin remédier à la disparité des niveaux linguistiques, en faisant souvent varier la géographie de classe, en formant des binômes fort/faible où l’un pourra reformuler à l’autre, lui expliquer, le soutenir, ce qui l’encouragera à pratiquer la langue cible. La mise en place de projet permet aussi à chacun de trouver sa place suivant ses compétences.
Si l’hétérogénéité est omniprésente côté apprenants, le versant enseignant n’est pas en reste. On rencontre bien souvent le FLE au hasard d’une expérience de vie, d’une rencontre, d’un voyage… vous qui nous lisez qui êtes-vous ? Quel est votre parcours ? Où enseignez-vous ? Pourquoi comment fait-on carrière dans le FLE ? Voici un nouvel axe que nous nous attacherons à développer dans les prochains billets de ce blog.
Caroline Biro, enseignante à l’Alliance Française Paris Île-de-France