FDLM434 – Culture : L’Araignée de Louise Bourgeois
Culture : L’Araignée de Louise Bourgeois
Reportage Culture du 7 Mars 2021 – Muriel Maalouf
Pour aller plus loin, faites l’exercice sur RFI Savoirs :
https://savoirs.rfi.fr/fr/apprendre-enseigner/culture/laraignee-sculpture-majeure-de-louise-bourgeois/1
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Muriel Maalouf : Généralement, l’araignée rebute voire fait peur jusqu’à la phobie chez certaines personnes. Et pourtant Louise Bourgeois intitule son araignée gigantesque Maman. Marie-Laure Bernadac, autrice d’une biographie de l’artiste aux éditions Flammarion.
Marie-Laure Bernadac : Quand elle dit « maman », c’est vraiment un hommage à sa mère parce que – rappelons-le – l’araignée, c’est quand même la tisseuse par excellence. Quand on remonte à l’origine mythologique, c’est cette fameuse Arachné donc qui a été punie parce qu’elle a fait la plus belle tapisserie, le tissage le plus fin et je crois que Athéna, furieuse, la transforme en araignée. Donc, au départ, l’araignée est une tisseuse et comme sa mère tenait un atelier de restauration de tapisserie, quand elle dit « maman », maman, c’est la tisseuse, c’est le fil, c’est la couture, c’est un hommage à sa mère.
Muriel Maalouf : Sa mère que Louise Bourgeois perd jeune à l’âge de 20 ans. Un traumatisme qu’elle refoule car c’est sur le tard, dans les années 1990, qu’elle commence à sculpter des araignées. Elle a déjà 80 ans.
Marie-Laure Bernadac : Cette figure de l’araignée qu’elle a décliné de plusieurs façons. D’abord des petites, des moyennes, des araignées en couple, des araignées en famille, géométriques, des araignées avec des pattes très serpentines qui courent sur le sol. Et puis, elle est arrivée jusqu’à cette immense figure, la plus grande, c’est celle qu’on appelle « Maman » de plus de 3 mètres de haut et cette Maman est une véritable maman parce que quand on se met dessous, on s’aperçoit qu’elle a des œufs. Elle a un panier avec des œufs, des œufs en verre et il y a 3 œufs.
Muriel Maalouf: Une sculpture qui est aussi une prouesse technique. L’araignée repose sur des pattes très fines.
Marie-Laure Bernadac : Toutes les pattes d’abord sont réalisées en plâtre puis après ont été fondues en bronze. Pour elle aussi, c’est la sculpture la plus gigantesque, la plus monumentale – qu’elle avait réalisée d’ailleurs pour une commande à Londres en 2000 – et après elle en a réalisé 6 exemplaires qui ont été distribués dans différents lieux symboliques : le musée Guggenheim à Bilbao, le musée d’art moderne à Tokyo, une autre au Canada. Elles sont en plein air. Alors ce qui est extraordinaire, parce que c’est des sculptures qui doivent être vues par tout le monde, qu’on peut traverser. On avait eu la chance lors de la rétrospective Louise Bourgeois en 2018 d’en installer une dans le jardin des Tuileries, au milieu des arbres de la pelouse, et elle avait évidemment très photographiée et vue par tout le monde parce que, tout d’un coup, ces jambes comme ça gigantesques, ce corps – normalement monstrueux – dressé dans l’espace devenait quelque chose d’attirant et de fascinant.
Muriel Maalouf : Et grâce à Louise Bourgeois, l’araignée n’est plus cet insecte repoussant. Au contraire, elle rassure, nous entoure, bienfaitrice. Une véritable maman.